«Mon seul regret, c’est qu’il n’y a plus de zones grises dans la musique électronique de nos jours. Les raves ont désormais lieu au SkyDome [Rogers Centre] et on achète les billets pour y assister sur TicketMaster ou Live Nation. Dude, je m’ennuie vraiment de l’époque où on se rejoignait à Union Station pour se diriger tous ensemble vers un événement organisé avec des bouts de ficelle et dont on savait que les flics allaient fort probablement y faire un descente. C’était amusant et un peu téméraire, c’était la folie de la jeunesse. Les kids d’aujourd’hui ne connaîtront jamais ça. Je repense souvent à cette époque et je me dis « Merde, j’aimerais vraiment pouvoir revivre ça ».»

Zimmerman s’est installé à Toronto à l’âge de 17 ans et il a commencé à produire de la musique pour le label house Play Records, tout en étant pigiste en programmation Web et en travaillant pour une entreprise de logiciels audio basée en Belgique.

C’est toutefois lorsque deadmau5 est sur scène que l’on peut le mieux saisir l’ampleur du phénomène, notamment grâce aux logiciels qu’il crée lui-même pour ses spectacles.

«Contrairement à ce que bien des gens pensent, j’étais très underground à mes débuts», se rappelle-t-il. «Je bidouillais avec le logiciel Impulse Tracker sur le 386 dans le sous-sol de mes parents, je composais de la musique Nintendo, jusqu’au jour où une compagnie de boucles audio m’a engagé comme producteur.»

Deadmau5 a lancé quelques albums indépendants, dont notamment Get Scraped (2005) et Vexillology (2006) qui ont attiré l’attention de la communauté underground, mais c’est lorsqu’il a mis sur pied son propre label, Mau5trap, et conclu des partenariats avec Ultra Music et Ministry of Sound que sa carrière a réellement pris son envol. Son troisième album, Random Album Title, s’est rendu au sommet des palmarès Dance Mix/Airplay de Billboard en septembre 2008, grâce, notamment, à sa collaboration avec Kaskade sur la pièce Move For Me.

Une autre collaboration avec Kaskade, I Remember, s’est également rendue au sommet des palmarès ainsi que sur le Top 30 britannique. Move for Me et Random Album Title lui ont mérité une nomination et une victoire, respectivement, aux prix Juno, ainsi que le premier de trois prix consécutifs aux Beatport Awards à titre de Meilleur artiste Electro House et Meilleur artiste Progressive House.

À cette époque, il était très ouvert quant à son intention de créer des enregistrements «transparents», ce qu’il décrivait plus précisément comme «quelque chose de très clair» à Resident Advisor, ajoutant qu’il effectue le mastering de sa musique dès l’étape de l’enregistrement. «L’idée c’est d’entendre chacune des nuances grâce à un mixage très minutieux. La transparence, c’est une approche qui s’applique à l’ingénierie sonore, au placement de certains sons, et à une attention particulière à certaines fréquences, que ce soit pour les mettre en valeur ou les atténuer.»

Son album For Lack of a Better Name paru en 2009 l’a propulsé encore plus haut dans la stratosphère du succès avec une première nomination aux Grammy. Son remix de la pièce The Longest Road de Morgan Page mettant en vedette Lissie a été nommé dans la catégorie Meilleur enregistrement remixé, non-classique. Depuis, il a été en nomination à trois reprises consécutives dans la catégorie Meilleur album Dance/Electronica pour 4×4 = 12 (2012), Album Title Goes Here (2013) et son plus récent opus, while (1<2), un ambitieux projet de 25 pièces totalisant 4 heures 30 minutes de musique paru en 2014.

Ce dernier album, while (1<2), rend notamment hommage un des héros de Zimmerman, Trent Reznor, à travers une réinterprétation de la pièce Ice Age, tirée du projet How To Destroy Angels, ainsi qu’une autre de la pièce Survivalism de Nine Inch Nails. Deadmau5 parle en termes très généraux de la démarche créative de cet album.

«Ce n’est pas simplement une question de composer un hit ou de créer une image de marque», explique-t-il sur son site Web. «J’adore être ingénieur du son pour tous les styles musicaux. J’ai travaillé sur des pièces hip-hop, des pièces glitch, des concertos pour piano et des méga hits dance. Je crois que la plupart de mes fans le savent, et cet album est pour eux. Et si ce n’est pas pour eux, peut-être que ce disque me permettra de rejoindre de nouveaux fans qui ne sont pas amateurs d’EDM.»

C’est toutefois lorsqu’il est sur scène que l’on peut le mieux saisir l’ampleur du phénomène, notamment grâce aux logiciels qu’il crée lui-même pour ses spectacles.

Rolling Stone a déjà expliqué le processus de préparation du musicien pour ses spectacles: «Zimmerman commence d’abord par créer son set en programmant les chansons qu’il veut présenter par blocs de six-minutes totalisant deux heures. Il en retire ensuite le plus d’éléments possible – une percussion par-ci, une boucle de basse par-là – pour finalement tout reconstruire en direct sur scène grâce à une armada de synthés.»

Pour y arriver, deadmau5 utilise «une matrice de 16×16 où chacun des boutons s’illumine. À partir de ça, il est facile de créer un séquenceur où chacun de ces boutons a sa propre fonction. C’est Steve Duda qui a construit cette appli monstre baptisée MOLAR, qui est une extension de MLR.

«Steve a un talent hors du commun pour les machines complexes, et il a construit ce truc afin que l’on puisse y charger des fichiers WAV et ensuite les déconstruire. Ça vous permet de séquencer le fichier, d’y insérer des balises MIDI ou des données concernant la lecture du fichier WAV. Ça vous permet de permuter le fichier audio de tellement de façons que vous pouvez réellement « jammer »… Je prépare au moins 150 boucles et je les intègre au répertoire.»

Échantillonnage, séquençage, boucles: deadmau5 est sans contredit un des génies du EDM, un musicien dont la créativité et l’intégrité n’ont pas fini de redéfinir le genre, et il ne fait que commencer!

Faits saillants
Éditeur: EMI April Music Canada Ltd., Play Records Publishing
Discographie (albums studio): Get Scraped (2005), Vexillology (2006), Random Album Title (2008), For Lack of a Better Name (2009), 4×4=12 (2010), Album Title Goes Here (2012), while(1<2) (2014)
Site Web: www.deadmau5.com
Membre de la SOCAN depuis 2006



Bobby Bazini, sa blonde, sa guitare et même son chien étaient fin prêts pour la grande traversée des États-Unis en voiture. Le prétexte était idéal: se rendre à Los Angeles pour y enregistrer son deuxième album, Where I Belong. Mais avant d’entrer en studio, il allait tenter le roadtrip pour se remplir la tête de grands espaces. Y trouver quelque chose de beau, de vrai, qui dicterait son interprétation une fois rendu à destination. Que sa Kia franchisse ou non les 4500 kilomètres le séparant de la Californie était secondaire. De toute façon, il savait que les prochaines fois, il retournerait à L.A. en avion.

« Ça aurait été plus romantique de faire le voyage en sportive décapotable, mais bon, ça m’aurait couté plus cher d’essence, » rigole Bobby Bazini qui est depuis retourné aux États-Unis pour donner des showcases, des entrevues et des concerts en première partie de la chanteuse Lily Kershaw. « Percer le marché américain est un travail de longue haleine. Il faut repartir de la base et mettre tous les efforts nécessaires pour que le public entre en contact avec sa musique. C’est difficile de jouer en première partie. Les gens ne sont pas encore tous arrivés, et ceux qui sont là parlent parce qu’ils ne sont pas venus pour te voir… Pour capter leur attention, il faut se donner sur scène, être en grande forme. Je me rends aussi dans la foule après les concerts pour parler avec les spectateurs et leur donner des cartes de téléchargement gratuit pour une chanson. » 

« Au final, c’est mon nom et ma photo qu’on voit sur l’affiche. Je veux que les décisions me ressemblent. »

Le musicien l’avoue d’emblée, « l’exercice de séduction demande une bonne discipline. Je n’ai pas vraiment le temps de jouer les rockstars. Même qu’en tournée, je bois plus d’eau citronnée avec un peu de miel que d’alcool. J’essaie de me coucher tôt lorsque c’est possible. Je ne veux pas m’inquiéter sur scène en me demandant si ma voix tiendra jusqu’au bout. » À 25 ans, Bobby Bazini donne l’impression d’être une voiture de course autour de laquelle s’affaire un bataillon d’ingénieurs. Il y a le réalisateur de Where I Belong, Larry Klein (Joni Mitchell, Madeleine Peyroux, Melody Gardot), qui l’a mis sous contrat avec son label Strange Cargo avant de convaincre Capitol de lancer son disque aux États-Unis. Il y a l’impresario à l’international, Rich Isaacson, qui s’occupe aussi de la carrière de Mika. Il y a Universal Canada et, finalement, sa garde rapprochée: son équipe de gérance locale constituée de Geneviève Gélineau et du chroniqueur culturel Mike Gauthier.

Dire qu’il y a trois ans à peine, après l’immense succès de son album Better In Time, Bobby Bazini devait se rebâtir une nouvelle équipe suite à une séparation houleuse avec son gérant de l’époque (lire Tourner la Page, ci-dessous). « Lorsque j’ai commencé ma carrière, je ne savais pas comment la business fonctionnait. Mais aujourd’hui, je participe à toutes les discussions concernant ma carrière et les stratégies de mise en marché. Je m’implique davantage, et j’ai choisi mon entourage en fonction de cette nouvelle philosophie. Je veux savoir où je m’en vais. J’ai un droit de véto sur toutes les décisions qui concernent mon image et ma musique, » explique le compositeur qui avoue parfois trouver cette gestion difficile. « Je me retrouve avec des informations qu’un artiste n’a pas toujours besoin de savoir comme les offres et contre-offres d’une négociation de contrat. Mais au final, c’est mon nom et ma photo qu’on voit sur l’affiche. Je veux que les décisions me ressemblent. »

Bobby Bazini cite en exemple l’enregistrement de Where I Belong, alors qu’aucun producteur n’a eu accès au studio pendant les sessions. « Larry Klein leur a envoyé le disque à la fin seulement. Ça n’avait rien à voir avec mon premier album, alors que la gérance était toujours derrière mon épaule pour s’assurer que je ponde des hits. Cette fois, j’ai fait ce que je voulais, comme délaisser un peu le folk pour plonger dans la musique soul. »

Ce virage, le musicien le présentait dès la fin de la tournée pour Better in Time. Larry Klein lui aura permis de le réaliser. « En composant mes nouvelles pièces à la guitare acoustique, je savais qu’elles prendraient une autre dimension avec la chaleur des arrangements soul, une musique que j’ai toujours écoutée. Grâce aux contacts de Larry, j’ai pu enregistrer avec des légendes de la musique soul dont l’organiste Booker T. Jones qui a joué avec Otis Redding, le percussionniste Jack Ashford entendu sur des classique de Marvin Gaye et surtout mon batteur préféré: Jay Bellerose (Diana Krall, Robert Plant & Alison Krauss, Bob Dylan, Elton John). J’étais comme un enfant à qui on offre de piger dans le plat ses bonbons favoris. »

Visiblement, les producteurs n’avaient pas à s’inquiéter. Album canadien le plus vendu au Canada en 2014 et en nominations aux Juno 2015 dans les catégories Album de l’année et Choix du public, Where I Belong (certifié platine) démontre la nouvelle maturité de Bazini. Il a beau répondre à nos questions avec une voix de gamin, son chant résonne toujours avec autant de force et d’émotions.

Tourner la page
En 2012, l’impresario Cesar Boestein dépose une poursuite pour bris de contrat contre son poulain Bobby Bazini à qui il réclame 108 000$. « J’ai gagné en cour parce qu’il ne s’est pas présenté. Même qu’après vérification de ses livres comptables, c’est lui qui me devait de l’argent. Il a fini par déclarer faillite, et j’ai perdu beaucoup de sous dans cette mésaventure. Mais tout ça est derrière moi. Je me suis bâti une nouvelle équipe de gérance qui me ressemble. Notre relation est simple et humaine. Personne ne joue de game. Même qu’en concert, c’est mon gérant Mike Gauthier qui accorde mes guitares avant de me les amener sur scène. J’ai l’impression que tout le monde rame dans la même direction, la bonne. »



L’île du Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse, est la terre d’origine ou d’accueil de nombreux membres bien connus de la SOCAN, dont notamment la violoniste primée Natalie MacMaster, le groupe country-folk The Rankin Family, les membres du groupe pop celtique The Barra McNeils ainsi que Gordie Sampson, un auteur-compositeur gagnant d’un prix Grammy. Mais la Nouvelle-Écosse est aussi la province où se trouve le Ceilidh’s Pub, un pub de Dartmouth reconnu pour ses nombreux spectacles de musique gaélique et folk typique du Cap-Breton et un fier participant au programme Autorisé à vous divertir de la SOCAN.

L’établissement a ouvert ses portes en 2013 et s’est rapidement bâti une importante équipe de musiciens et d’auteurs-compositeurs qui donnent régulièrement des spectacles en semaine et devant une salle comble les week-ends.

«Je tenais à recréer l’ambiance d’un party de cuisine typique des maritimes dans mon pub», explique Roseanne MacKinnon, la propriétaire du pub. «La musique joue un rôle crucial au Ceilidh’s Pub. Après tout, le mot Ceilidh signifie un regroupement d’amis et de membres d’une famille dans le but d’échanger, de prendre des nouvelles de tout le monde, de jouer de la musique et de danser.»

Un vaste éventail de musique traditionnelle écrite et composée par des habitants de la région peut être entendu à toute heure du jour. Il y a une soirée hebdomadaire ouverte aux talents amateurs et les vendredis soirs sont réservés aux violoneux.

«Notre pub est devenu LA place pour de la bonne musique, et bien sûr de la bonne bouffe», s’enorgueillit MacKinnon. «Être licencié par la SOCAN nous permet d’être l’endroit, dans notre communauté, où les musiciens et les auteurs-compositeurs peuvent venir pour faire valoir leur talent et partager leurs créations.»

Le Ceilidh’s Pub aide également à promouvoir le talent musical des maritimes d’une autre manière: une fois par moi, l’établissement est l’hôte d’ateliers de création musicale où les artistes de la région – la majorité étant des membres de la SOCAN – se réunissent pour échanger et créer.

En conclusion, Roseanne MacKinnon confie le secret de son succès: «Il faut deux ingrédients: de la bonne musique et de la bonne nourriture».