Une nouvelle chanteuse pop vient d’arriver sur nos radars. Après avoir enchaîné des simples accrocheurs pendant deux ans, Olivia Lunny propose maintenant à son auditoire la clé de son journal intime sur son premier album éponyme.

Arrivée toute jeune dans le monde de la musique, l’auteure-compositrice-interprète n’a jamais arrêté depuis le jour où elle a gratté une guitare pour la première fois. Lunny n’avait que 14 ans lorsqu’elle est montée sur la scène du Winnipeg Folk Festival devant 40 000 personnes. Depuis sa passion pour l’écriture de poèmes en quatrième année jusqu’à la signature d’un contrat avec Universal Music en mai 2021, Lunny a compris très tôt les possibilités offertes par l’ajout de quelques accords qui transforment ses poèmes en chansons. « Un jour, je suis rentrée d’une dure journée à l’école et je me suis installée avec ma guitare pour déstresser », raconte l’auteure-compositrice-interprète. « C’est là que j’ai commencé à écrire des chansons complètes. De fil en aiguille, je me suis retrouvée là où j’en suis aujourd’hui. »

Quelques années plus tard, la native de Winnipeg était comme tous les autres jeunes au début de la vingtaine qui essaient de naviguer dans la vie. Au fil de son expérience de la vie, Lunny écrivait des textes et des mélodies reflétant ses principales influences : Fleetwood Mac, Coldplay et Ed Sheeran.

Puis, en 2019, elle a mis son pied dans le pas de la porte en participant et en gagnant le concours The Launch. En avril 2020, peu de temps après que la COVID-19 soit qualifiée de pandémie mondiale, elle a été sélectionnée pour chanter aux côtés de Justin Bieber, Avril Lavigne et Michael Bublé pour une reprise de « Lean On Me » (qui est devenue un succès du Top 40) afin de venir en aide aux activités de la Croix-Rouge canadienne. Peu de temps après, elle a ajouté une autre réussite à sa liste déjà passablement longue en remportant le Concours de la Fondation SOCAN pour les jeunes auteurs-compositeurs grâce à sa chanson « Bedsheets ».

La carrière de Lunny est encore à ses débuts, mais la liste de ses collaborateurs compte déjà plusieurs poids lourds de l’industrie. À propos de son simple « Who Could Say No », sorti en 2021, elle explique que tout s’est produit en studio en faisant référence à sa collaboration avec le producteur Boi-1da (Drake, Rihanna, Lana Del Rey), lauréat d’un Grammy, et le producteur à succès YogiTheProducer (Kehlani, Jessie Reyez).

« J’étais en studio avec YogiTheProducer et Boi-1da et il était très tard », dit-elle. « Le studio était illuminé par des lumières très cool et il m’a fait écouter ce beat vraiment cool. J’avais envie d’écrire une chanson très joyeuse, amusante et inspirante, surtout que la pandémie a été une période très sombre pour bien des gens. C’est comme ça que “Who Could Say No” est née. »

“Cette pause a été très importante pour moi parce que je me mettais tellement de pression pour écrire”

Ode aux peines et aux blessures d’amour profondes, Lunny utilise ce premier album comme une carte de visite en leur offrant une perspective authentique et vulnérable sur son parcours personnel. « J’espère que ma musique deviendra la trame sonore de la vie des gens », dit-elle. « J’aimerais simplement faire partie du parcours des gens. »

Lunny affirme que la pandémie a eu un impact sur son écriture en la forçant à réaliser qu’elle avait besoin de prendre un peu de recul par rapport à la musique. « J’ai eu beaucoup de difficulté à écrire durant les premiers mois de confinement », raconte l’artiste. « Puis, au bout de deux mois, j’ai attrapé ma guitare et j’ai recommencé à écrire. Cette pause a été très importante pour moi parce que je me mettais tellement de pression pour écrire. »

 Selon elle, son processus créatif est spontané et se produit en périodes d’intense créativité qui peuvent survenir à tout moment. « Une chanson me prend soit 20 minutes ou trois jours à écrire », explique-t-elle. « Ça part dans tous les sens, mais c’est vraiment amusant parce que ça garde les choses intéressantes. Je pense que le plus dur pour un auteur-compositeur est d’écrire des paroles vraiment uniques, cool et intelligentes. Je dirais que c’est vraiment facile d’écrire une mauvaise chanson. »

Lunny tarde de retrouver la vie post-COVID afin de pouvoir parcourir le monde et partager son amour de la musique et de la création. « J’aimerais écrire pour d’autres artistes, faire le tour du monde et donner des spectacles à plein d’endroits différents », confie-t-elle. « Je n’ai jamais été en tournée pour vrai. Alors pas besoin de te dire que j’ai vraiment hâte de planifier des spectacles ! »



Charles Aznavour, Jehan Valiquet

G à D: Charles Aznavour, Jehan Valiquet

Charles Aznavour fait partie de ceux qui ont su résister à l’épreuve du temps et des modes, de ces quelques paroliers francophones, les rares, qui ont su toucher un public qui ne parle même pas leur langue. Et c’est à ce géant que l’éditeur Jehan V. Valiquet dédie son tout dernier grand projet d’album.

Jehan V. Valiquet œuvre dans les coulisses de l’industrie musicale depuis presque 40 printemps et à titre d’éditeur, de gardien des droits d’auteurs, en somme, pour quelques-uns des plus beaux textes des chansons du Canada, de France et de Belgique. Les répertoires de Serge Lama, Julien Clerc, Vanessa Paradis et Yves Duteil chez nous ? C’est lui.  Certains des plus beaux titres de Ginette Reno, Lara Fabian, Robert Charlebois, Charles Trenet et Félix Leclerc logent également chez Musinfo, sa compagnie.

Au fil des ans, il a su gagner la confiance de Gérard Davoust, héros de l’ombre par excellence, le directeur général des Éditions Raoul Breton. Une maison de légende, assurément la plus prestigieuse de France.

« Un moment donné, j’ai pu avoir Serge Lama et puis, à cette époque-là, il était représenté par Breton. Ce que je faisais, c’est que je prenais rendez-vous avec Gérard Davoust pour lui présenter les rapports sur ce qui vend, ce qui tourne. On était toujours dans le vouvoiement et c’est un peu normal, ça se vouvoie entre frères et sœurs là-bas ! […] C’était très froid, je dirais, mais il m’invitait de temps en temps pour manger des huîtres pas loin de son bureau sur la rue Rossini. Une fois, je lui ai dit ‘’vous savez M. Davoust, ce qui m’intéresserait ? C’est le catalogue de Charles Aznavour.’’ Il m’a répondu ‘’vous savez, M. Valiquet, ça pèse lourd !’’ Mais moi, je ne connaissais pas l’expression… Alors, j’ai dit, ‘’pas de problème, j’ai de la place dans ma valise !’’ Je pensais qu’il voulait me donner des partitions, tout ça. Il a dû me prendre pour un deux de piques… »

Amoureuse des motsAu fil leurs rencontres toujours très solennelles, à Paris ou à Cannes pendant le MIDEM, Gérard Davoust a fini par desserrer sa cravate et prendre ses aises, par passer du « vous » au « tu » pour lui offrir, et presque sur un plateau d’argent, le répertoire du grand Aznavour. Un moment crucial. Jehan V. Valiquet en garde par ailleurs un souvenir indélébile. « En sortant, il m’a dit ‘’en passant, je te donne Aznavour’’. Je ne m’attendais pas à ça. Il est entré dans son bureau et moi, j’étais en plein milieu de la rue. J’ai crié ‘’wow’’ et les gens ont dû penser que j’étais fou ! »

Seize ans après avoir rassembler autant d’artistes dont Pierre Lapointe (qui interprétait Les plaisirs démodées) et Diane Dufresne autour d’un album en hommage à Charles Aznavour, Jehan V. Valiquet remet ça avec un autre projet en tout point semblable, mais réunissant exclusivement des femmes. Parmi elles : la virtuose du spoken word répondant au sobriquet Queen Ka, la Montréalaise d’origine haïtienne Rebecca Jean et la pianiste Valérie Lahaie. Que des artistes complètes, que des dames, membres SOCAN, qui sont, elles aussi, capables d’empoigner la plume. Des Amoureuses des mots, finalement.

« Ce sont toutes des auteures-compositrices-interprètes, évidemment chanteuses, musiciennes pour certaines. Elles sont toutes signées en exclusivité chez Musinfo, je suis éditeur de leurs chansons. J’ai eu ce flash-là pendant la pandémie. […] C’est une belle opportunité pour faire connaître ces filles-là, elles font toutes leur petit bonne-femme de chemin avec leurs réseaux sociaux, Spotify, YouTube, Apple Music, tout ça. »

Annie Poulain

Annie Poulain

Annie Poulain est l’une d’elles, une vocaliste jazz au registre d’alto qui s’est illustrée plus d’une fois avec des nominations au Gala de l’ADSIQ, la créatrice du disque Dix piano une voix paru de façon pleinement indépendante en 2018. C’est elle qui entonne Le jazz est revenu, un titre on ne peut plus actuel considérant le récent succès d’un projet jazzé comme Les Louanges, ou la récente ascension d’une musicienne comme Dominique Fils-Aimé. « Maintenant, j’espère simplement que la vision d’Aznavour à cette époque se voulait prémonitoire, souligne-t-elle, et que le jazz reviendra véritablement en force dans les prochaines années ! »

La Mamma a également droit à un nouveau tour de piste, portée par la voix de l’Italo-Québécoise Dominica Merola. Un texte qui résonne en elle d’une façon différente, à présent. « Avec l’année que nous venions de traverser, privés de baisers, des caresses de notre propre mère, cette chanson m’a prise dans les tripes »

Le monde change, mais, grâce au travail créatif d’édition de Jehan V. Valiquet, les mots de Charles Aznavour demeurent, actuels et perméables à toutes les épreuves qu’on traverse collectivement, absolument intemporels.



J-F et Paige se sont vus pour la première fois alors qu’ils voyageaient dans le désert du Nevada, puis ils n’ont plus eu envie de rentrer à la maison. En voyage ensemble dans l’Ouest américain, le Québécois et la Géorgienne, tous deux musiciens, ont décidé de partager leurs influences. En rentrant à Montréal, ils sont devenus le duo MIELS et même en restant ici, leur rock électro nous fait voyager. Leur musique née dans le désert parlait de ce qui était là : l’espace, la chaleur, l’amour naissant. Puis l’histoire s’est renouvelée dans d’autres paysages. Ils ont trouvé la musique partout autour.

En s’installant au Québec, Paige a tout de suite voulu traduire en français toutes les notes en anglais qui se trouvaient dans son carnet de voyage. « Quand j’ai déménagé à Montréal, j’étais surprise parce qu’il y a beaucoup de francophones qui ont des bands en anglais et je voulais juste faire l’inverse, se rappelle Paige en riant. C’était important pour moi de poursuivre ma carrière musicale en français. »

« Vu que je suis francophone, j’avais oublié c’était quoi avoir des mots préférés pour aucune raison et j’aime voir comment Paige s’amuse avec la langue qu’elle apprend », ajoute J-F. Voyager au Québec porte ainsi une vocation toute particulière pour le duo qui en profite pour s’imprégner de diverses sonorités issues des endroits visités et des accents qui leurs sont propres.

Dans les mois qui ont suivi leur rencontre, Paige et J-F se sont fait découvrir mutuellement des univers musicaux, la première s’intéressant vivement aux vieux classiques rock québécois qu’elle n’avait évidemment jamais entendus. « Elle a vraiment aimé Pagliaro, par exemple et moi, ça m’a ramené dans le rock d’ici d’une autre époque et ça m’a donné envie de ramener certaines choses du passé dans la musique qu’on fait aujourd’hui, explique J-F. Avant que Paige déménage, je lui envoyais des vinyles par la poste. Je l’ai vite convertie à Jean Leloup », se rappelle-t-il.

Sa nouvelle langue, Paige l’a apprise à travers la musique, ce qui est, selon elle, « beaucoup mieux qu’un cours traditionnel ». Hormis le rock du passé, le duo a tout de suite voulu faire ressentir l’absence d’immobilité dans leur projet. « On s’est rencontrés en voyage et ensuite, chaque fois qu’on se voyait, on faisait un road trip », ressasse J-F. Leur premier album, Prends-moi comme la mort (mai 2021) se présente ainsi comme une œuvre très intime. « C’est la chronologie de nos voyages en musique, un hommage à tout ce qu’on avait écrit, respectivement dans nos cahiers, sur la route aux États-Unis », dit J-F.

Quelques spectacles au FME et au Taverne Tour, entre autres, ont tracé de nouvelles avenues pour le couple qui s’est laissé influencer par ce qui devient plaisant sur scène. « On était partis d’un genre de rock blues, se souvient Paige, mais sur scène, ce qui était l’fun, c’était de se rapprocher de l’électro, avec des backtracks de drum. Un genre d’électro-rock du début des années 2000. »

MIELS s’est laissé envouter par tous les possibles de la spontanéité. En formule duo, tout était possible ou presque pour eux. « Plus on écrivait et plus on se voyait bien dans l’idée de n’être que nous deux, mais avec des membres ajoutés quand ça nous plaît et si ça nous plaît, explique J-F. Les White Stripes sont devenus une grande inspiration : quelque chose qui vit aussi bien à deux qu’à plusieurs. »

« Il y a des défis d’adaptation entre la scène et le studio, mais on peut improviser », dit Paige. « T’as ton équipement dans la valise, tu peux faire un show n’importe où, ajoute J-F. Oui, ça change notre son et ça change notre méthode parce qu’on est toujours en train de créer en se demandant si ça se fait à deux. Cependant, ça fait en sorte qu’on n’a jamais de limite. On peut déménager en Europe la semaine prochaine. »

Le deuxième album, préparé durant la pandémie, s’est déployé dans cette mentalité plus minimaliste, tout en ne sacrifiant jamais le désir de faire « du gros bruit ».

Dans tous les cas, le seul endroit où MIELS puise la suite des choses, c’est dans les voyages. « On a fait des voyages entre les quatre murs de notre appartement durant la pandémie, rigole Paige. C’était une autre sorte de voyage. On veut aussi faire le Canada au complet dans notre van. »

« On trouvait ça difficile d’écrire dans notre cuisine donc on a passé deux mois sur la route l’an dernier avec la guitare ploguée dans le lecteur cassette, raconte J-F. On a fait du camping dans le bois pour laisser la nature nous dicter la suite. »

Le duo continuera toujours de composer, le regard tourné vers ce qu’il y a dehors. « On est tout le temps en train de noter et de regarder les choses, conclut Paige. J’entends des sons que je n’ai jamais entendus avant dans la bouche des gens d’ici et j’ai envie de les reproduire et d’en connaître plus. Je n’aurai jamais fini d’apprendre. »