Originaire de France, ex-journaliste spécialiste des sports équestres, Xavier Debreuille est aujourd’hui directeur du développement et des éditions au sein de Musicor Disques, en plus de siéger au conseil d’administration de l’Association des professionnels de l’édition musicale (APEM). Il partage avec nous son expérience du métier et prodigue quelques conseils aux aspirants éditeurs et auteurs-compositeurs à la recherche du parfait partenaire éditorial.

Musicor, Logo« Le métier d’éditeur est mal compris, notamment des musiciens eux-mêmes », reconnaît Xavier Debreuille, qui s’est initié au complexe univers des éditions via le milieu de la télé sportive dans lequel il évoluait avant de s’installer ici. À une autre époque, remarque l’éditeur, les auteurs-compositeurs se tournaient naturellement vers les éditeurs; aujourd’hui, ceux-ci « pensent souvent pouvoir faire ce travail eux-mêmes parce qu’une idée reçue veut que l’éditeur, ça ne fait que leur prendre des sous, que ça ne sert à rien et que simplement en s’inscrivant à SOCAN, ça peut suffire ».

Cette perception est peut-être nourrie par une confusion des genres entre la maison de disque et la maison d’édition, croit celui qui, incidemment, travaille sur ces deux tableaux. « Évidemment, une œuvre vit beaucoup plus facilement à partir du moment où elle a été enregistrée. Donc, si c’est la maison de disque qui fait l’enregistrement et qui ensuite en assure l’exploitation, la commercialisation, la confusion des genres vient sûrement du fait que c’est la maison de disque qui fait le boulot, et pas l’éditeur. »

Il en revient aux éditeurs eux-mêmes de préciser l’importance du travail d’éditeur – notamment à travers les nombreuses formations professionnelles que prodigue l’APEM, une initiative « importante dans laquelle il faut que le milieu de l’édition s’engage encore plus fort. Les formations sont super, mais leurs succès relèvent encore de la démarche de ceux qui y participent, c’est-à-dire les membres de l’industrie qui ont déjà envie de s’informer davantage. La prochaine étape, je crois, c’est d’offrir ces formations au Cégep, dans plus de festivals. Il faut aller à la rencontre des artistes. »

Tout ça dans le but d’encourager et former la relève. « Un bon éditeur, c’est d’abord un bon gestionnaire. Quelqu’un d’extrêmement rigoureux et attentif aux détails, parce qu’il y a une grosse partie du travail qui relève de l’administration, qui s’ajoute au volet artistique. C’est de la gestion, administrative, mais humaine, aussi: on travaille avec des artistes, tous uniques, avec leurs égos, avec des auteurs-compositeurs qui peuvent parfois aussi souffrir de vivre dans l’ombre » des interprètes.

« Il ne faut pas hésiter à essayer autre chose, à aller voir ailleurs »

Aux aspirants éditeurs, Xavier Debreuille offre deux conseils. Le premier : « Mettre les choses au clair avec les auteurs-compositeurs dès le début de la collaboration. Ne pas attendre le succès ou l’insuccès – lequel est d’ailleurs souvent plus facile à gérer – pour que l’éditeur et l’auteur s’entendent finalement. Avant même d’entrer en studio pour commencer une collaboration, il faut que l’éditeur discute avec l’artiste, ou que les éditeurs de deux différents artistes se soient parlé, pour bien établir les règles du jeu. Ce que je dis-là n’a rien d’artistique, mais c’est important. »

« Autre conseil que j’aimerais donner aux éditeurs : favoriser les collaborations entre auteurs-compositeurs. Je crois qu’il est important que ceux-ci élargissent leurs horizons sur le plan de la création. C’est sûr que lorsqu’on trouve un mix qui fonctionne bien, un compositeur et un auteur qui travaillent bien ensemble disons, c’est tentant d’encourager cette collaboration, mais il ne faut pas hésiter à essayer autre chose, à aller voir ailleurs. »

Pour y parvenir, Musicor Disques invite régulièrement des auteurs-compositeurs à participer à des camps d’écriture en vue de l’enregistrement de l’album d’un artiste interprète – ce fut le cas pour ceux d’Alexe Gaudreault (révélée lors de la première saison de La Voix, en 2013) et de Geneviève Jodoin (gagnante de la 7e saison de La Voix). « C’est comme ça qu’on évolue, sinon on finit par tourner en rond. »

« Tout revient aux relations humaines », rappelle Xavier Debreuille. « Il faut que l’auteur-compositeur ait confiance en son éditeur. Après, moi, j’essaie d’être le plus réaliste possible avec les auteurs lorsqu’ils m’approchent. Je leur explique le travail que je fais. Je ne leur raconte pas que tout sera facile, il n’y a rien de garanti. »



Les chiffres

  • 150 millions de vues YouTube
  • 950 000 abonnés YouTube
  • 65 millions de diffusions en continu sur Spotify, Apple, Amazon
  • 1,2 million d’auditeurs mensuels sur Spotify

Pendant toute sa jeunesse à Vancouver, Alex Porat a fait tout ce qu’elle pouvait pour devenir une vedette pop. Elle a passé son enfance à assister à des auditions pour des concours de talents pour enfants et ses samedis à chanter des tubes de Whitney Houston et de Christina Aguilera dans l’aire de restauration du centre commercial local, où il y avait une petite scène et un micro installés pour les karaokés improvisés. Au secondaire, elle a commencé à mettre en ligne des reprises sur YouTube pour se bâtir un public. « Quand on est jeune, on ne sait pas vraiment comment faire entendre sa voix », dit Porat. « YouTube était un moyen pour les gens d’entendre ma voix ».

Ce n’est pourtant qu’à l’université que Porat a connu sa grande chance. Dans une vidéo du magazine Glamour, Shawn Mendes regarde la reprise YouTube émouvante de Porat sur sa chanson « In My Blood ». « Alexandra », dit Mendes dans la vidéo, « tu es incroyable, ta voix est géniale, et tu l’as chantée parfaitement ».

« À ce moment-là, j’ai réalisé qu’il était possible d’être musicienne », dit Porat. « Soudain, j’ai eu l’impression que si je continuais à faire de la musique, peut-être que les choses pourraient continuer à se développer. » À l’époque, Porat venait de terminer sa deuxième année d’université et envisageait déjà de ne pas y retourner à l’automne. Cette vidéo lui a donné l’impulsion finale pour poursuivre la musique à plein temps.

Depuis, elle n’a cessé de travailler. En 2020, elle a sorti son premier EP, bad at breakups, qu’elle a enregistré pendant la pandémie. Ses chansons alt-pop accrocheuses sur le chagrin d’amour, la solitude ou le fait de voir ses ex passer à autre chose sur les médias sociaux est en quelque sorte comme un précurseur de Sour par Olivia Rodrigo. Son simple le plus récent, « Dimension », est parfait pour les pistes de danse. Porat est également prête à monter sur scène plus tard en 2021 : « La première chanson de mon EP est sortie le week-end avant le confinement au Canada », se souvient Porat. « Pouvoir enfin chanter mes chansons sur scène est comme un rêve. »



Jusqu’à il y a trois ans, l’artiste vancouverois Boslen s’orientait vers un tout autre avenir. Inscrit à l’Université de Victoria grâce à une bourse d’études sportives et jouant dans l’équipe nationale de rugby du Canada, il a vu s’écrouler son rêve de devenir un joueur professionnel de rugby après s’être déchiré le ligament croisé antérieur. Prisonnier de sa résidence étudiante durant son long rétablissement, il a commencé à se demander sérieusement ce qu’il allait faire de sa vie.

« La musique m’a vraiment aidé », reconnaît-il. « Elle m’a empêché de m’effondrer ou d’imploser. [Cette période de retrait] m’a vraiment forcé à agir et m’a inspiré l’idée de me tourner vers la musique. »

Non que la bascule de Boslen dans le rap et le R&B ait été une surprise totale pour ses intimes. Il avait commencé à faire du rap à 13 ans dans son patelin de Chilliwack, en Colombie-Britannique, sur des thèmes d’un enfant de son âge comme les punitions ou le fait d’avoir à faire la vaisselle. « C’était débile », concède-t-il en riant. « Aujourd’hui, par contre, j’ai un certain vécu. Je peux aborder des sujets dans lesquels les gens se reconnaissent et même, peut-être, les inspirer. »

Boslen s’est attaqué à la musique avec la fougue et la prouesse qu’il avait consacrées à sa carrière de joueur de rugby. Depuis le lancement de Motionless, son premier EP, en 2018, il s’est produit en compagnie d’artistes comme Rae Sremmurd, A$AP Rocky et Young Thug, et il a fait la première partie d’un spectacle de Cypress Hill à Vancouver devant plus de 100 000 spectateurs. Il est sur le point de lancer son premier album complet et de « faire honneur à Vancouver ».

Intitulé DUSK to DAWN et lancé dès cet été par l’entremise de Capitol Records/Universal Music Canada, cet album devrait confirmer la réputation de Boslen comme un artiste inclassable qui est aussi à l’aise dans le rap pur et dur que dans le R&B expressif ou la pop émotive. Côté paroles, il explore des thèmes profondément personnels comme la vulnérabilité, l’autonomisation, les relations empoisonnées et l’oppression.

« Comme jeune Noir et Autochtone élevé par une mère monoparentale, je me sentais obligé de jouer le rôle du maître de la maison, d’être fort et de ne pas montrer mes sentiments parce que je croyais que c’était un signe de faiblesse », explique Boslen. « Mais je pense que, avec cet album, le fait de m’exprimer à travers ma faiblesse sera la chose la plus forte que je puisse faire. Ce que je voudrais accomplir par-dessus tout, ce serait d’en aider d’autres à s’autonomiser ».