Bien que Jennifer ait toujours apprécié la musique de film, lorsqu’elle a quitté Toronto pour s’établir à Los Angeles en 1990 dans le but d’y étudier la composition pour longs métrages à la University of Southern California, elle était simplement à la recherche d’une nouvelle direction. Après avoir obtenu son baccalauréat en théorie et composition musicale de la University of Western Ontario ainsi qu’un certificat en interprétation et pédagogie du piano au Royal Conservatory of Music, « je songeais à l’obtention de ma maîtrise, mais j’avais vraiment envie d’essayer autre chose », raconte-t-elle.

Depuis, elle a composé des bandes-son pour des productions télé et cinéma dont Rebellious (1995), Marry Me or Die (1998) et Del’s Crazy Musical (2010), en plus de composer des musiques pour Princess Cruises, Ringling Bros. et Disney on Ice, entre autres. Ces derniers temps, toutefois, Wilson se concentre sur sa plateforme d’édition en ligne, sheetmusicdeluxe.com, en plus de développer de nouvelles techniques et méthodes d’enseignement de la musique.

Au fil du temps, son travail en composition pour le cinéma et un « sens visuel » qui a toujours fait partie de son approche musicale ont eu une influence substantielle sur son travail de pédagogue et son travail de sensibilisation au fait que la composition devrait faire partie de l’apprentissage des jeunes étudiants en musique.

« Il y a un je ne sais quoi dans le fait d’être en mouvement – vélo, marche, peu importe – qui déclenche mon processus créatif. »

Wilson a adopté les technologies numériques dès le début, mais elle se concentre généralement sur l’acte de la composition plutôt que sur la technologie qui s’y rattache. « J’ai décidé, il y a fort longtemps, que je ne voulais pas m’embourber dans l’aspect “course à l’armement” de notre domaine », confie-t-elle, avant d’ajouter qu’elle préfère, de loin, les processus analogiques « crayon et papier » de la composition.

« J’aime pouvoir tout étaler devant moi, peu importe la surface, parce que j’aime pouvoir tout voir d’un coup d’œil », explique-t-elle. « Laissée à moi-même, je vais ruminer une palette harmonique et apprivoiser l’ADN musical d’une histoire, mais j’aime également être en mouvement lorsque je compose. À Toronto, je composais dans le métro. Il y a un je ne sais quoi dans le fait d’être en mouvement – vélo, marche, peu importe – qui déclenche mon processus créatif et m’aide à trouver le tempo et la personnalité des personnages. »

Travaillant à partir des notes qu’elle prend dans une multitude de cahiers qu’elle trimballe avec elle, Wilson commence par visualiser la structure d’ensemble d’une œuvre. « Je travaille essentiellement comme une architecte », dit-elle. « Puis, vient un moment charnière où les notes s’imposent d’elles-mêmes. »

Les conseils de Wilson pour les compositeurs, jeunes et moins jeunes :

  • « Apprenez à être confortable en composant sans l’aide d’un instrument — laissez les choses se placer d’elles-mêmes plutôt que de forcer vos doigts à tout trouver. »
  • « Savoir, c’est révéler en agissant ; donc si vous voulez apprendre à composer une sonate dans le style de Beethoven, composez une sonate dans ce style. »
  • « Composer est impératif — engagez-vous à composer plus et n’ayez pas peur de l’échec. »

Avoir foi en ce processus, même dans le cadre de projets très exigeants, lui vient en partie de ses études auprès de compositeurs légendaires comme Henry Mancini et Jerry Goldsmith, entre autres, de qui elle a appris une leçon d’une valeur inestimable : « Peu importe votre niveau de renommée, vous ressentirez toujours une certaine insécurité au début d’un projet », croit-elle. Il cite en exemple une histoire que lui a racontée Goldsmith au sujet d’une séance d’orientation (spotting session) durant laquelle on lui a demandé dans quelle direction la musique devrait aller. « Il a dit que la réponse à laquelle il pensait était “je ne sais pas. Pourquoi me demandez-vous ça ? Qu’est-ce que je fais ici ?” Donc, même après avoir écrit la musique de tant de films, il est encore possible de ressentir beaucoup d’insécurité au début d’un projet, ce qui est rassurant, d’une certaine manière. »

Rassurer cette insécurité chez les étudiants, particulièrement les enfants, est au cœur de son travail d’enseignante et au cœur de son livre publié en 2005, Composition for Young Musicians : A Fun Way for Kids to Begin Creating Music. « Les enfants excellent dans le processus créatif », dit-elle. « Je crois que la composition devrait être au cœur de l’enseignement musical. À l’époque, on n’y accordait pas d’importance dans l’environnement des cours de piano privés. C’est de ça que le livre parle. »

Il s’agit essentiellement d’un effort pour encourager l’amour de la composition chez les enfants, sans limiter leur instinct créatif inné. « Si une éducatrice de maternelle présente un seau de peinture et un pinceau, les enfants sauront quoi faire. Mon livre traitait de leur donner accès aux outils de la composition sans passer par la porte de la théorie. » Et sans un enseignant qui montre aux étudiants le « comment » de 75 % de tout ça, ils peuvent combler ce vide eux-mêmes.

« C’est une question d’apprendre en le faisant », dit Wilson. « J’ai abordé la question en tant que compositrice à l’image qui se dit des trucs comme “composons une musique qui sonne comme de la neige qui tombe du ciel. Comment peut-on y arriver au piano ? Déjà, les touches blanches ressemblent à de la neige.” Après on peut prendre conscience qu’il s’agit de la gamme pentatonique et leur expliquer pourquoi ça évoque de la neige qui tombe, mais ça n’est pas nécessaire de parler de ça au début du processus. »