Colin Linden a le blues dans le sang. C’est un ami de son frère qui lui a fait connaître la culture blues à un moment décisif de sa vie en lui faisant découvrir Howlin’ Wolf (aka Chester Burnett).

Peu de temps après, en novembre 1971, Linden, alors âgé de 11 ans, a eu la chance de rencontrer cette légende du blues lors d’une séance en matinée à la Colonial Tavern de Toronto. Ils ont discuté pendant de longues heures et sont devenus amis. Rich in Love, premier album solo du guitariste et producteur en six ans, voit l’homme de la Renaissance collaborer avec de nombreux collègues et poids lourds de l’industrie sur des pièces inspirées par de regrettés amis. Il en résulte une douzaine de pièces d’une incroyable profondeur et regorgeant de soul qu’il est impossible de ne pas avoir envie d’écouter attentivement. Chaque note est étudiée avec soin et l’on peut y entendre l’influence de Howlin’ Wolf et des nombreuses autres figures du genre qui ont inspiré le voyage musical de Colin Linden.

« C’est toujours aussi excitant d’une fois à l’autre », confie l’artiste au sujet de l’enregistrement d’un album solo. « C’est pratiquement identique que lorsque j’avais 20 ans. Ce qui est fascinant, c’est que je ne savais pas que j’allais ressentir cela avant que l’album ne soit lancé. »

« Je suis simplement content d’avoir écrit quelques chansons qui sont honnêtes et vraies. »

Rich in Love est le fruit de nombreuses collaborations. « C’est l’histoire de [Dymond], Gary [Craig] et moi », raconte Linden. « L’histoire de trois musiciens qui jouent ensemble et des trois décennies d’amitié et de musique que nous partageons. »

Dymond, le bassiste, et Craig, le batteur, partagent la scène avec Linden depuis si longtemps qu’il existe entre les trois hommes une simpatico et une intime complicité qui s’installe d’elle-même lorsque le trio est réuni. Rich in Love a principalement été enregistré à Nashville, dans le studio maison de Linden. Parmi les invités sur l’album, on retrouve notamment l’harmoniciste Charlie Musselwhite et le claviériste Reese Wynans (Stevie Ray Vaughan). Et, malgré son décès en 2007, « l’esprit de Richard Bell [claviériste] imprègne l’album », avoue Linden.

J’ai rencontré le guitariste et producteur à Music City en route vers le plateau de tournage de la très populaire série télé Nashville dont la quatrième saison est présentement en production en vue d’une diffusion sur les ondes d’ABC cet automne. Linden agit à titre de directeur musical pour la série et il est responsable de 75 % de la guitare que l’on peut entendre dans la série, en plus de « coacher » les acteurs sur leur chant et leur jeu musical.

Ces dernières années ont été très prolifiques pour l’artiste de 55 ans. Linden a été guitariste de tournée pour Bob Dylan, a joué à la Maison-Blanche, ainsi que sur Tomorrow Is My Turn de Rhiannon Giddens en plus de lancer un album de Blackie & The Rodeo Kings intitulé South. Comme si tout ça n’était pas suffisant, il a également produit des albums pour de nombreux autres musiciens, dont notamment Telling Time d’un membre de la SOCAN en pleine ascension, Lucas Chaisson. Et, à travers tout cela, le musicien a également trouvé le temps d’écrire et d’enregistrer Rich in Love.

La majeure partie des chansons ont vu le jour sur une période d’environ deux ans. « Tout a commencé quand Johnny, Gary et moi nous sommes installés dans une petite pièce de ma maison », se souvient Linden. « Blackie & The Rodeo Kings venaient tout juste de terminer un spectacle dans le cadre du Hardly Strictly Bluegrass Festival à San Francisco, et ces deux-là sont rentrés à Nashville avec moi. Nous nous sommes dit “prenons quelques jours et voyons où cela nous mène”. »

« Je devais me rendre sur le plateau de Nashville », poursuit-il. « Quand je suis rentré chez moi environ trois heures plus tard, ils avaient déménagé le divan qui se trouve dans mon studio pour installer une batterie à sa place. Janis [la femme de Linden] et Johnny avaient installé des rideaux et Gary avait disposé les coussins du divan afin de modifier la sonorité de la pièce… tout était en place; c’est comme ça que tout a commencé. Nous avons enregistré les deux ou trois premières pièces afin de tâter le terrain. On se disait que le pire qui puisse arriver était que ces enregistrements demeurent à l’état de démo, mais elles ont abouti directement sur l’album. »

Plusieurs chansons sur Rich in Love ont été inspirées par les mots d’amis regrettés, mais jamais oubliés. « No More Cheap Wine », par exemple, provient en grande partie de Paul Quarrington, un musicien et romancier. De dire Linden : « Lorsque Paul a reçu son diagnostic de cancer du poumon de stade 4, la première chose qu’il a dit c’est “Fini la piquette : à moi le bon vin!” J’ai trouvé que c’était une façon admirable d’accepter cette fatalité qu’est la limite de notre propre vie. Il a été d’une grande inspiration. »

Malgré tout son succès, Colin Linden demeure d’une très grande humilité. « Je suis timide lorsque vient le temps de parler de mes compositions, car lorsque vous jouez de la guitare sur “Desolation Row” en compagnie de gars qui l’a écrite [Bob Dylan], ça remet en perspective votre propre talent d’auteur-compositeur. Je suis simplement content d’avoir écrit quelques chansons qui sont honnêtes et vraies. »

PVI
Éditeur : Warner Chappell Music Canada Ltd.
Discographie choisie : Rich in Love (2015); Still Live (2012); From the Water (2009); Big Mouth (2003); Southern Jumbo (2005); South at Eight North at Nine (1993); The Immortals (1986)
Membre de la SOCAN depuis 1992
Visitez le http://www.colinlinden.com

Faits saillants

  • « Delia Come For Me », sur ce nouvel album, a en partie été inspirée par l’exécution pour meurtre de Troy Davis, une histoire qui a rappelé à Linden la meurtrière ballade country-blues « Delia ».
  • Linden a également joué sur l’album de Gregg Allman nommé aux Grammys, Low Country Blues;
  • Il est le lauréat de huit prix Juno.


Bernard AdamusBernard Adamus lançait cet automne un troisième album au titre à coucher dehors : Sorel Soviet So What, clin d’oeil à So Far, So Good… So What! de Megadeth (1988). Ce titre, personne n’aurait pu l’inventer à part lui. Le grand Adamus fait partie, comme Lisa LeBlanc, Jean Leloup et Safia Nolin, des personnages charismatiques de notre panorama musical, des belles bébittes dont on veut découvrir l’histoire.

Attablé devant une eau minérale (!!), il semble dangereusement en forme. Il raconte la petite histoire derrière le titre : « Un soir que je m’étais déguisé en motard à l’Halloween, je m’étais écrit ça sur le bras pis j’trouvais ça ben drôle. En même temps c’était une façon de me libérer de tout le poids du jugement des autres, une manière de dire « Arrêtons de capoter, c’est rien que des tounes! ». Ce titre, complètement psychédélique, est une bonne joke menée à terme. Ça sonnait ben à mes oreilles alors je l’ai gardé. »

Le travail sur la langue, vernaculaire, est important chez Adamus. À l’oreille, c’est fluide, ça coule de source. Dans Les pros du rouleau et Donne-moi-z’en, il atteint des sommets de densité textuelle. Le débit est rapide : on a l’impression que personne d’autre que lui ne pourrait s’emparer d’un tel texte pour le faire exister! « Je peux passer deux jours sur la même phrase jusqu’à temps qu’elle sonne bien. Même si certains me trouvent vulgaire ou whatever, l’apport du langage, c’est le moteur premier de la toune. Tout part de la relation entre le rythme des mots et le sens des paroles. »

Bernard AdamusDans Le blues à GG, Adamus va jusqu’à mettre en musique le texte d’un écrivain qui partage aussi cette vision des choses : Gérald Godin. « J’ai essayé de trouver quelque chose qui me ressemblait, dans quoi je pouvais être aussi naturel. Ce collage d’un poème de Godin, j’aurais quasiment pu l’écrire! »

Petit empire américain

Pendant un moment, Bernard a jonglé avec l’idée d’intituler son troisième album Dix tounes américaines. « Ça reste de la musique américaine, je continue à faire un mélange de blues, de musique de cabaret et de chanson, mais j’étais un peu tanné d’être le petit chanteur de galerie. Je savais pas exactement où je voulais aller, mais je savais ce que je voulais pas. La directive, c’était le groove, que ce soit plus vivant. C’est un album construit avec un esprit de band, pas des gars qui accompagnent un chanteur. »

Cette recherche de grooves a mené Bernard sur de nouveaux territoires, comme sur la chanson Hola les lolos, lancé au coeur de l’été, porteuse d’une belle brise hawaïenne. Impossible de résister à l’allitération en « L » de la phrase-mantra du refrain : on jubile. Dans cet hommage à la poitrine féminine, il contourne habilement le piège de la vulgarité :


Le poids de ma noix quand l’vert jaunit
Dans l’creux d’tes mains que l’ciel est gris
À snoozes-tu ben au p’tit matin
Ma belle grande face entre tes deux seins

« Quand j’ai dit aux gars ce que je voulais faire, ils ont trouvé ça un peu risqué… Je ne pense pas avoir offusqué personne avec ça, c’est la plus politically correct de l’album! » Cette chanson s’est hissée jusque dans le 6 à 6 de CKOI. Est-ce que Bernard Adamus souhaite élargir son public, gagner de nouveaux auditeurs? « Le but, c’est de ne jamais faire de compromis. Je fais mes affaires et advienne que pourra. C’est très cool qu’Hola les lolos soit rentrée à CKOI, c’est un beau cadeau. En pop, on voit souvent des albums avec deux, trois bonnes tounes et le reste est fade. Moi je préfère développer une relation intime à long terme avec mes fans que d’avoir un hit radio, mais de pas être capable de remplir ma salle à Trois-Rivières, d’autant plus que j’aime ça, moi, partir en tournée et faire des shows. »

Avant même que son album soit lancé, Adamus avait déjà une vingtaine de spectacles bookés à l’automne. C’est d’ailleurs sur la route qu’il a écrit et composé les chansons de Sorel Soviet So What. Il a mangé de l’asphalte, fait de nombreuses rencontres… « Il y a beaucoup de mouvement, l’album reflète bien mes trois dernières années passées en tournée. »

Entre légendes locales et autofiction, Adamus brosse la peinture d’un petit monde intrigant, ça grouille et c’est plein de couleur. Il pose un regard tendre, mais non complaisant sur les hurluberlus sympathiques qui traversent ses chansons avant de repartir sur une « chire »… « J’ai laissé une partie de mon spleen de côté. C’est encore moi, ma perspective, une chronique de mes jours, mais je parle aussi des autres. Un peu moins de mes états d’âme. »



On a connu Alexe Gaudreault en 2013, alors qu’elle épatait 2 millions de téléspectateurs partout au pays et, par le fait même, l’auteur-compositeur Marc Dupré, qui l’a vue joindre les rangs de son équipe du grand succès télévisuel La Voix, par son interprétation musclée du grand classique « Quand on a que l’amour » de Jacques Brel.

Ce même bout de femme obtient maintenant un succès retentissant tout en haut du palmarès BDS avec la chanson «Placebo », coécrite par Gaudreault, ainsi que par le multi-instrumentiste et réalisateur John Nathaniel (qui compte plusieurs succès radios à son actif, notamment avec Final State et Andie Duquette) et la parolière Mariane Cossette-Bacon.

Un son résolument de son temps, parfaitement taillé pour les ondes hertziennes, qui s’inscrit tant dans la lignée du Wall of Sound de Phil Spector que des chansons velcro de Ryan Tedder et de Lana Del Rey.

Toujours en collaboration avec Nathaniel, la jolie rousse trimera dur cet automne à l’achèvement d’un premier album complet à paraître en 2016.